Carnets de l'Economie

Brevets : l’Europe signe une année record avec près de 200.000 dépôts




Anton Kunin
23/09/2025

En 2023, près de 200.000 demandes de brevets ont été déposées à l’Office européen des brevets. Un record qui illustre la vitalité du continent, mais aussi la compétition accrue avec les géants mondiaux.


La France, bien que deuxième au palmarès européen, comptabilise plus de 10.000 demandes de brevets en 2023

D'après la dernière communication de l’Office européen des brevets, 199.275 demandes de brevets ont été enregistrées dans l'Union européenne en 2023, soit une progression de 2,9% par rapport à 2022. Cette tendance s’inscrit dans une dynamique continue après +2,6% en 2022 et +4,7% en 2021. Ces dépôts constituent un indicateur précoce des investissements en recherche et développement. Leur hausse traduit l’attrait du marché européen, considéré comme l’un des espaces les plus favorables à la commercialisation d’inventions à haute valeur technologique.

Si l’Europe représente environ 43% des dépôts, les performances varient selon les États. L’Allemagne conserve sa place de leader continental avec plus de 25.000 demandes, affichant une légère hausse (+1,4%). La France, deuxième pays européen dans ce palmarès, a reculé de 1,5% pour atteindre 10.814 dépôts, mais reste un pilier de l’innovation, ainsi que le sixième contributeur mondial. D’autres pays montrent une dynamique plus marquée : le Royaume-Uni progresse de 4,2%, l’Italie de 3,8%, tandis que la Finlande s’impose avec une croissance de 9,2%, suivie par l’Espagne (+6,9%). Ces trajectoires contrastées traduisent une recomposition progressive du paysage européen, où les puissances traditionnelles côtoient des nations en plein essor technologique.

Les demandes de brevets déposées à l’OEB révèlent les priorités technologiques actuelles. Trois secteurs dominent : la communication numérique, les technologies médicales et l’informatique. La croissance la plus spectaculaire est cependant observée dans les technologies liées à l’énergie propre, notamment les batteries, avec une hausse de 28% sur un an. Les biotechnologies (+5,9%) et les techniques de mesure (+4%) complètent ce tableau des disciplines en expansion. Cette diversification illustre la capacité de l’Europe à conjuguer innovations numériques, médicales et environnementales.

Un palmarès dominé par l’Asie mais nourri par l’Europe

Les États-Unis demeurent le premier pays d’origine des demandes de brevets déposées en Europe. Ils sont suivis par l’Allemagne, le Japon, la Chine et la République de Corée, cette dernière entrant pour la première fois dans le top cinq grâce à une progression spectaculaire de 21%.

L’Asie dans son ensemble confirme sa puissance : la Chine a accru ses dépôts de 8,8% en un an, et leur volume a plus que doublé depuis 2018. Pourtant, les entreprises européennes maintiennent leur rang : elles sont à l’origine de près de 86.000 demandes en 2023 et montrent une forte vitalité dans les communications numériques (+10,7%) et les biotechnologies (+6,4%).

Les entreprises revendiquent les trois quarts des brevets déposés

Près d’un quart des brevets déposés en 2023 provenaient de PME, d’universités ou d’inventeurs individuels. Une proportion qui illustre la diversité de l’écosystème de l’innovation et qui justifie les efforts de l’OEB pour adapter sa politique tarifaire. À compter du 1er avril 2024, les microentreprises, laboratoires académiques et organismes à but non lucratif bénéficieront de réductions de taxes pouvant atteindre 30%.

La diversité progresse également sur le plan humain. En Europe, 27% des demandes mentionnaient au moins une femme inventrice en 2023. La France se distingue en affichant 33%, tandis que l’Espagne atteint un record avec 46%. Ces données traduisent un rééquilibrage progressif dans un univers longtemps marqué par une forte domination masculine.

Le brevet unitaire, nouvel outil stratégique

Depuis juin 2023, les inventeurs disposent d’un nouvel instrument : le brevet unitaire, applicable dans 17 pays de l’Union européenne. Cette innovation juridique permet une protection centralisée et une réduction des coûts de procédure. Elle a immédiatement rencontré un succès notable, puisque 17,5% des brevets délivrés en 2023 ont fait l’objet d’une demande d’effet unitaire. Dans la seconde moitié de l’année, ce taux est monté à 22,3%. Les titulaires européens ont été les plus nombreux à recourir à ce mécanisme, avec un taux d’adhésion de 25,8%. Des entreprises comme Johnson & Johnson, Siemens ou Ericsson figurent parmi les plus grands déposants dans ce cadre. Pour la France, environ 1.300 brevets ont été convertis, soit près de 20% des titres délivrés aux acteurs nationaux.

Ce dynamisme ne doit pas masquer la compétition internationale. Avec 57% des demandes venant de pays extérieurs au continent, l’Europe est à la fois un pôle d’attraction et un champ de bataille pour l’innovation mondiale. Les champions asiatiques, Huawei en tête avec plus de 5.000 dépôts, redessinent le paysage, tandis que les entreprises européennes cherchent à conserver leurs positions stratégiques dans des secteurs de rupture. Dans cette course, l’Europe dispose d’atouts : un marché intégré, une politique de soutien aux PME et désormais le brevet unitaire. Mais elle doit composer avec des rivaux disposant de moyens considérables en matière de recherche et développement.










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