Carnets de l'Economie

Carmat : la cotation en Bourse est suspendue en attendant l’audience sur son offre de reprise




Anton Kunin
19/08/2025

Le dossier Carmat entre dans sa phase critique. L’unique offre de reprise, chiffrée à 1 million d’euros pour le capital et 150 millions d’euros d’apports programmés, sera soumise au tribunal de commerce de Versailles le 19 août 2025. Les enjeux financiers, industriels et réglementaires dépassent largement le seul cadre d’un sauvetage judiciaire.


L’offre de Pierre Bastid, une proposition structurée mais risquée

Depuis juillet 2025, Carmat, pionnier du cœur artificiel Aeson, est placé en redressement judiciaire. Le 19 août, le tribunal des affaires économiques de Versailles examinera une offre exclusive, révélée par BFM Business, qui déterminera l’avenir d’une société emblématique de la medtech française.

Le processus de cession n’a généré qu’une seule offre, déposée par Pierre Bastid, président du conseil d’administration et actionnaire de référence. La proposition prévoit un rachat de Carmat pour 1 million d’euros, via une structure familiale belge, et l’injection de 150 millions sur cinq ans, dont 40 millions dès janvier 2026. Selon BFM Business, Bastid a déjà mobilisé 60 millions d’euros depuis 2017 et met en vente un actif new-yorkais estimé à 76 millions de dollars pour financer l’opération.

L’offre inclut la reprise de 138 salariés et s’accompagne d’un objectif industriel ambitieux : assurer la montée en puissance du cœur Aeson et amener Carmat à l’équilibre opérationnel. Le plan prévoit une sécurisation des ressources financières mais comporte une clause implicite : sans validation du tribunal, puis du ministère de l’Économie (au titre du contrôle des investissements étrangers dans la santé), Carmat court le risque d’une liquidation rapide.

Un modèle économique encore fragile

Malgré des décennies de R&D, Carmat n’est pas rentable. La société a implanté seulement 42 cœurs en 2024 et 16 au premier trimestre 2025, loin de l’objectif des 500 unités annuelles jugé nécessaire pour générer un cash-flow positif. Le prix catalogue actuel, fixé à 167.000 euros, pourrait être majoré de 15 à 20% avec la nouvelle génération de prothèse, en phase de validation réglementaire.

Le management reconnaît la dépendance à une montée en cadence rapide, mais les défis restent multiples : approbations cliniques dans d’autres juridictions, industrialisation, réduction des coûts de production. Dans ce contexte, Carmat a suspendu la cotation de son action le 14 août 2025, en attendant l’audience décisive du 19 août 2025. La direction, par la voix de Stéphane Piat, insiste néanmoins : « Nous sommes sur le pont ».

Carmat, symbole d’une innovation fragilisée

Fondée en 2008, introduite en Bourse en 2010, Carmat a longtemps incarné la promesse d’une révolution biomédicale. Mais la réalité industrielle et financière a heurté ses ambitions. Après la perte de soutiens majeurs tels qu’Airbus et Bpifrance, et une série de contretemps, l’entreprise a vu son image ternie par des événements cliniques graves en 2021, entraînant une suspension des implantations pendant près d’un an.

Aujourd’hui, l’offre de Pierre Bastid est perçue comme un dernier recours stratégique. Elle conditionne la sauvegarde de trente ans de recherche et de près d’un demi-milliard d’euros investis. Carmat dispose toutefois d’un atout : l’obtention récente du marquage CE au titre du règlement MDR, qui confère une légitimité réglementaire en Europe et pourrait constituer un levier décisif pour la relance, si le tribunal valide l’opération.










Décideurs

LVMH : le bénéfice net s’effondre au premier semestre 2025

Renault avertit sur ses résultats et chute en Bourse

Antonio Filosa, l’Italien discret devenu patron de Stellantis

Bénéfice par salarié : quelles entreprises remportent la palme ?








Découverte & Lifestyle


L'actu de la RSE