Accession à la propriété : les dispositifs d’aides sont mal adaptés



Anton Kunin
06/12/2016

La Cour des Comptes pointe une baisse importante de l’efficacité des différentes aides censées faciliter l’accession à la propriété.


Les dysfonctionnements que dénonce la Cour des Comptes sont largement dus au mode de pilotage central des aides, qui est éclaté entre plusieurs ministère, voire plusieurs directions au sein d’un même ministère. Au niveau territorial, les services de l’État n’ont aucune visibilité sur le rythme et le mode de distribution des aides, qui relèvent de deux réseaux distincts : les caisses d’allocations familiales pour les aides au revenu et les banques pour les prêts bonifiés. Par ailleurs, les dispositifs que la Cour a examinés lui semblent complexes et mal articulés. L’efficacité de chacun d’entre eux serait en baisse.

Le prêt à taux zéro ne viserait pas le bon public

Le premier dispositif dans le collimateur de la Cour des comptes : le prêt à taux zéro. D’après les Sages, il aurait perdu sa vocation d’ascenseur social pour les personnes dont revenus sont loin de leur permettre d’acquérir un logement sur fonds propres. Successivement recentré sur les revenus moyens en 2012 et sur les revenus modestes en 2013, le prêt à taux zéro s’adresse aujourd’hui à un autre public : 45 % des ménages s’étant vu octroyer un prêt à taux zéro en 2015 avaient des revenus qualifiés « d’intermédiaires ».
Par ailleurs, le nombre d’opérations financées tous les ans par un prêt à taux zéro a baissé de 40 % entre 2011 et 2015. Et pour mieux se rendre compte de l’ampleur de l’écroulement de ce dispositif, deux chiffres :  en 2011, 64 % des primo-accédants ont été financés par le PTZ; ils n’étaient que 11 % en 2014.

Des dispositifs qui ne trouvent pas leur public

Deux autres dispositifs ont été analysés par les Sages : le prêt d’accession sociale et le prêt social de location-accession. Le tort du premier : son taux d’intérêt est devenu supérieur à celui du marché. Par ailleurs, les possibilités de cumul avec les aides personnelles ont été limitées. La Cour recommande carrément de le supprimer.

L’autre dispositif, le prêt social de location-accession, est un prêt conventionné accordé à un opérateur comme un organisme HLM, une société d’économie mixte ou un promoteur privé pour financer la construction ou l’acquisition de logements neufs qui feront l’objet d’un contrat de location-accession. En d’autres mots, après un nombre d’années de versment d’une indemnité, le locataire pourra devenir propriétaire du logement qu’il occupe. Une belle idée sur le papier, sauf que seuls 8 000 prêts de ce type ont été accordés en 2015, dénonce la Cour des Comptes.

Des conceptions d’une autre époque

Le principal tort de l’ensemble de ces dispositifs consiste dans le fait qu’ils ont été élaborés à une époque où la conjoncture économique était assez différente. Concrètement, depuis leur mise en place, un décrochage est intervenu entre les revenus des acquérants modestes et les prix de l’immobilier : le mètre carré est aujourd’hui 1,7 fois plus cher qu’en 1965 en moyenne. De plus, l’indice du prix des logements à l’achat et celui du prix des loyers se sont considérablement dissociés. Enfin, les taux d’intérêt ont beaucoup baissé ces dernières années, alors que les aides en questions ont été conçues lorsque les taux étaient élevés.

D’après les calculs de la Cour des Comptes, environ 2 milliards d’euros seront probablement consacrés aux différentes aides à l’accession à la propriété en 2017.