Rémunération d’Elon Musk : la fronde des investisseurs gagne du terrain



François Lapierre
05/11/2025

Le 4 novembre 2025, Norges Bank Investment Management (NBIM), gestionnaire du Fonds souverain norvégien, a annoncé qu’il voterait contre le plan de rémunération géant d’Elon Musk chez Tesla. À deux jours du vote décisif des actionnaires, cette prise de position, rare par sa fermeté, marque un tournant dans le débat mondial sur la rémunération des dirigeants. Le refus norvégien a fait écho auprès d’autres acteurs majeurs de la finance mondiale, illustrant un changement d’époque : la tolérance face aux rémunérations démesurées semble toucher à sa limite.


NBIM, le géant norvégien qui dit non à Elon Musk

Le Fonds souverain norvégien, fort de 2100 milliards de dollars d’actifs, a rendu publique sa décision sur son site officiel. Le fonds détient environ 1,12 % du capital de Tesla, soit près de 17 milliards de dollars de participation. Le fonds reconnaît la contribution exceptionnelle d’Elon Musk, mais juge le plan de rémunération, estimé à 1 000 milliards $ sur dix ans, excessif, risqué pour les actionnaires et mal encadré.

Le plan en question, appelé CEO Performance Award, prévoit l’attribution de tranches d’actions équivalentes à 12 % du capital de Tesla si le constructeur atteint une valorisation de 8.500 milliards de dollars. D’après Reuters, la valeur nette potentielle pour Musk atteindrait 878 milliards de dollars après déduction du coût des actions.

Le NBIM s’oppose également à la reconduction de deux administrateurs membres du comité de rémunération, Kathleen Wilson-Thompson et Ira Ehrenpreis, estimant que le conseil d’administration n’a pas su limiter les excès. La démarche, qui s’inscrit dans la politique de gouvernance éthique du fonds, met l’accent sur la transparence et la responsabilité à long terme envers les investisseurs.

Un écho mondial : les grands acteurs de la gouvernance montent au créneau

Le non du Fonds norvégien n’est pas isolé. Les cabinet de conseil en vote les plus écoutés de Wall Street, Institutional Shareholder Services (ISS) et Glass Lewis, recommandent à leur tour de rejeter la proposition de rémunération d’Elon Musk. Ces deux acteurs influencent des centaines de fonds de pension et d’investisseurs institutionnels dans leurs votes lors des assemblées générales.

Leur argumentaire rejoint celui de NBIM : le plan est jugé « excessif, mal aligné sur la performance à long terme et dangereux en matière de gouvernance ». Selon MarketWatch, les analystes d’ISS ont estimé que la structure de rémunération proposée concentrait trop de pouvoir entre les mains d’un seul individu et créait un précédent problématique dans l’industrie.

De leur côté, plusieurs fonds de pension américains ont également fait entendre leur voix. Le California Public Employees’ Retirement System (CalPERS) et la American Federation of Teachers (AFT) ont confirmé leur opposition au plan, selon The Guardian. Les deux entités dénoncent un manque d’alignement entre les performances réelles de Tesla et la rémunération projetée du dirigeant. La présidente de l’AFT, Randi Weingarten, a déclaré que ce type de rémunération « envoie le mauvais message aux enseignants, aux employés publics et aux petits investisseurs qui s’attendent à une gouvernance équilibrée et équitable ».

Malgré ces oppositions, Elon Musk conserve encore le soutien de plusieurs fonds privés et d’investisseurs de long terme, notamment Ron Baron, fondateur de Baron Capital Management, qui détient environ 0,4 % de Tesla. Baron continue de défendre la stratégie du PDG, estimant que « sans la détermination et la vision d’Elon Musk, Tesla n’existerait pas », selon AP News.