Dirty jobs : SET Environnement nous entraîne dans les coulisses du désamiantage



La Rédaction
04/01/2016

Qui sont les « désamianteurs », ces nettoyeurs de l’extrême ? Comment travaillent-ils ? Comment se protègent-ils? Eric Vallée, le patron du précurseur du désamiantage SET Environnement nous invite à plonger dans le quotidien de ses équipes.


Depuis quand l’amiante est-elle interdite ?

hoto : SET Environnement (Intervention dans les souterrains du chauffage urbain)
Toxique, l’amiante a fait l’objet d’une première réglementation en 1977. En 1996, c’est au tour du métier de « désamianteur » d’être légalement encadré. « A l’époque, la réglementation allait de façon quasi-évidente vers une interdiction totale à brève échéance : il allait donc être indispensable de pouvoir compter très vite sur des professionnels, susceptibles de prendre en charge le nouveau métier de « désamianteur » dans des conditions de sécurité maximales », explique Eric Vallée. L’activité de désamiantage de SET Environnement a d’ailleurs été impulsée par les pouvoirs publics au cours de cette même année 1996. Un an après, l’amiante est totalement interdite. Depuis, les chantiers se sont multipliés afin d’éradiquer l’amiante. Une « action d’utilité publique » selon le dirigeant,  pour lequel il s’agit ni plus ni moins de réparer « un passif environnemental, à l’échelle de la société». Mais le désamiantage est une activité qui ne s’improvise pas. 

Pourquoi le désamiantage est-il si complexe ?

Parmi les activités de dépollution, le désamiantage est l’une des plus complexes et exigeantes à mettre en œuvre. Chaque chantier nécessite un diagnostic propre afin de garantir une totale sécurité.  En effet, les risques diffèrent d’un chantier à l’autre et dépendent des matériaux dans lesquels sont détectés l’amiante. Car l’amiante a rarement été utilisée pure.

Aussi,  « l’amiante sous forme de flocage – de l’amiante mélangée à de la colle, schématiquement – est probablement le matériau le plus problématique, étant donné sa faible résistance mécanique et sa dégradation rapide dans le temps. On en trouvait par exemple dans les parkings, où un simple coup d’antenne de voiture suffisait à attaquer le matériau et à répandre de la poussière d’amiante», explique Eric Vallée.

Il s’agit donc pour ces « pompiers de l’infiniment petit » d’agir de manière chirurgicale et parfois dans des zones délicates. « Il nous arrive d’intervenir pour enlever l’habillage externe amianté de chaudières de plusieurs dizaines de mètres de haut, sur des échafaudages de même hauteur. Nous sommes également intervenus dans le secteur de la sidérurgie, à proximité de coulées de métal en fusion, dans des gaines d’ascenseurs d’immeuble de 20 ou 30 étages, ou encore dans des unités de chauffage urbain, avec des conditions de température extrêmes. Chaque intervention est unique et les risques de chaque chantier doivent être évalués et intégrés à notre prise en compte de la problématique amiante, en dehors de toute routine ou schéma préétabli» précise ce dernier. Ce savoir-faire de pointe permet aujourd’hui à SET Environnement de comptabiliser pas moins de 2500 chantiers à son actif.

Peut-on intervenir en toute sécurité sur un bâtiment ou un lieu ouvert au public ?

La population voisine du chantier n’est pas toujours rassurée à l’idée de voir sous ses fenêtres des opérations de désamiantage. De plus, il arrive parfois que le bâtiment traité par les professionnels de l’amiante reste ouvert pendant les travaux qui se concentrent alors sur une ou plusieurs zones à traiter localement.

En tant que spécialiste du désamiantage des sites occupés, Eric Vallée se veut rassurant : il explique la technique dite du confinement utilisée sur ses chantiers. « Il s’agit de créer une bulle étanche autour du chantier, ce qu’on appelle un confinement. Ce confinement est hermétiquement clos. Mais au cas où une faille apparaitrait, il est de toute façon maintenu à une pression atmosphérique plus faible que l’air ambiant, de sorte que des échanges d’air fortuits ne puissent se faire que de l’extérieur vers l’intérieur, et jamais l’inverse».

De plus, la législation est très stricte et impose tout au long du processus des contrôles, auxquels l’entreprise se borne scrupuleusement. SET Environnement a également développé en interne des outils permettant de suivre en temps réel le déroulement du chantier et de garantir une sécurité maximale. Cette technique permet par exemple de maintenir l’activité d’un hôpital ou d’un centre commercial, durant les opérations de désamiantage et ce, en toute sécurité.  « Les travaux de désamiantage n’ont pas vocation à détruire ou pénaliser l’activité économique », rassure Eric Vallée. 

Comment garantir un niveau de protection maximum aux travailleurs de l’amiante ?

Les équipes de désamiantage sont les premières exposées au risque de contamination d’où l’impératif de gérer le risque santé. Aussi de nombreuses règlementations protègent ces acteurs : combinaison étanches et masques neutralisants sont de rigueur, et sont complétés par un protocole très strict encadré par différents organismes dont l’inspection du travail.

De son côté, SET Environnement a adopté une posture de protection parmi les plus élevées sur les chantiers, au-delà même des seuils imposés par la législation. « En tant que dirigeant, ne serait-ce que d’un point de vue purement éthique, je ne peux pas tolérer que l’activité exercée par mes salariés ait des conséquences néfastes sur leur santé ou leur état physique », précise Eric Vallée qui a été longtemps salarié de l’entreprise avant d’en prendre la tête en 2014.

Le secteur du désamiantage, de surcroît, fait partie des rares professions qui ont l’obligation de détenir une certification pour exercer leur activité. En cas de manquement, le retrait de la certification implique l’arrêt des chantiers, ce qui contribue à maintenir un niveau de sécurité maximal. En outre, les « désamianteurs » suivent des formations hautement qualifiantes afin d’exercer leur métier en toute sécurité. Ils ont aussi et surtout la certitude d’exercer un métier à forte utilité sociale, comme le souligne Eric Vallée. Point de place pour l’amateurisme et l’approximation, donc.

Une éradication totale de l’amiante est-elle vraiment possible ?

La tâche est immense car l’amiante a massivement été utilisée, notamment sur les chantiers entamés au cours des 30 Glorieuses. Et il est encore fréquent de nos jours que des chantiers soient interrompus suite à la découverte d’amiante. De quoi laisser l’opinion publique assez perplexe.

Or, « à partir du moment où la production d’amiante et de biens manufacturés amiantés a été stoppée, nous avons la certitude que le stock d’amiante en circulation n’augmentera plus », affirme Eric Vallée. « Par contre, pour ce qui est de l’amiante actuellement en place au sein des bâtiments, le retrait complet exigera de venir au terme de l’ensemble des cycles de vie des bâtiments on infrastructures concernés. Ces cycles sont très longs, mais nous en viendrons un jour au bout » précise ce dernier.

Alors, l’amiante finira-t-elle par devenir un mauvais souvenir ? En France du moins, car de nombreux progrès sont encore à faire à l’étranger, assure l’expert du désamiantage. Une chose est certaine : l’expertise développée au service du désamiantage est un atout de taille dans la lutte contre d’autres substances toxiques comme le plomb et même la radioactivité. SET Environnement a d’ailleurs été sollicité sur ces terrains, ce qui montre bien que la France a de beaux atouts pour rester en pointe sur les questions de dépollution.